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Histoire de l’église Saint-Martin

En 1859, l'abbé Lagrange, curé de Loucrup, écrit à l'Impératrice Eugénie, épouse de Napoléon III, et catholique fervente.


« Madame, Encouragé par votre piété bien connue, je prends la liberté de solliciter votre charité, pour une œuvre éminemment chrétienne. La commune de Loucrup canton d'Ossun, département des Hautes-Pyrénées que je dessers depuis onze ans comme Vicaire Recteur, a son église dans un délabrement si extrême, qu'il y aurait à la fois inconvenance et danger à continuer l'exercice du culte dans un pareil local. Je me suis donc fait l'apôtre d'une Eglise nouvelle ; j'ai frappé à la porte de tous. Mes paroissiens quoique des plus pauvres du Diocèse, se condamnent à toutes les privations, à des efforts presque impossibles, puisque, volontairement, ils ont engagé leur signature pour 3700 francs. Des ecclésiastiques charitables, en voyant notre dénuement complet, ont souscrit pour une somme de 1200 francs : ainsi donc nous avons à notre disposition un capital d'environ 5000 francs. Néanmoins nous restons beaucoup au-dessous de nos besoins, car la dépense prévue par Monsieur l'Architecte qui n'a pas même porté en compte les transports et les corvées qui restent à la charge des habitants, s'élève encore à plus de 7000 francs. Si nous pouvions aboutir au Gouvernement d'une manière légale, nous aurions encore des chances, avec le secours alloué en pareille circonstance, de mener à bon terme la construction projetée. Mais dans notre position, notre demande serait inutile, attendu que le culte à Loucrup n'a pas d'existence légale et que le prêtre est entièrement à la charge des habitants. Notre Eglise donc doit être, depuis le fondement jusqu'au faîte, une œuvre toute de charité. En raison de notre position toute exceptionnelle, permettez-moi, Madame, d'espérer que vous voudrez nous faire quelque bien. Si tant d'autres œuvres qui ne subsistent que par vos bontés, ne rendaient pas impossibles de nouveaux bienfaits, il me semble que je n'aurais pas en vain exposé notre misère à un cœur aussi généreux, à une âme aussi catholique. N'importe l'effet de ma demande, je me souviendrai toujours, comme ministre de Dieu de vos sympathiques pensées pour les intérêts de la Religion et je continuerai à offrir au Seigneur mes faibles prières, pour votre prospérité, Madame, celle de votre auguste Epoux et du Prince Impérial votre joie et l'espoir de la France.

C'est avec le respect le plus profond que je suis, Madame, de Votre Majesté, le très-humble et très-obéissant serviteur. »


Le Vicaire Recteur Lagrange.
Loucrup, le 2 septembre 1859.


Nous ne connaissons pas la réponse de l'Impératrice. Ce qu'on sait en revanche, c'est que les travaux ont été effectués puisqu'en 1869, les maçons réclament leur dû :

"Le sieur Dubau maître maçon à Loucrup et le sieur Douat, maçon à Trébons, demandent pour la commune de Loucrup l'autorisation de défendre à l'action qu'ils se proposent de lui intenter pour la contraindre à faire procéder au règlement définitif des travaux qu'ils ont exécutés pour la construction de son église. Il y a dix ans aucun entrepreneur n'ayant voulu faire l'entreprise au prix du devis, le Maire d'alors engagea les susnommés à se charger des travaux de maçonnerie à des conditions mésestimées en un traité déposé à la Mairie et dont ils négligèrent de prendre expédition pour mettre le Maire actuel en demeure de tenir les engagements pris par son prédécesseur."  

Une construction d'église mouvementée que l'on peut donc dater avec certitude des années 1860.




Dans ce plan du village de 1878, figurent la nouvelle église (en bleu) ainsi que l'ancienne (en jaune) !

L'ancienne église était située à la place de l'actuel cimetière.

L'ancienne église, qui était dans un triste état, a été détruite.


Et comme pour le cimetière, il y avait aussi des problèmes...


(Délibération de 1833 )


... il était préférable de faire un nouveau cimetière (ou de l'agrandir), entouré d'un mur.

Voilà pourquoi 600 mètres séparent l'église et le cimetière aujourd'hui.


(Cadastre de 1885 )


Cet extrait du cadastre de 1878 était joint au dossier de construction pour l'école de garçons (8 rue Saint-Martin).


Source :
Archives Départementales.


Voici ce qu'écrivait Jean-Pierre Estrade, instituteur de Loucrup en 1881, au sujet de l'abbé Lagrange :

"L'esprit de la population était bon, le Curé, M. Lagrange, un bon et charmant vieillard de soixante-cinq ans, était là depuis trente-deux ou trente-quatre ans. C'est dire qu'il était aimé de tous ; mais il le méritait bien. Instruit, fin, possédant une véritable charité chrétienne, porté naturellement vers la justice et la concorde, il cherchait toujours à calmer les esprits, à apaiser les querelles, et il y réussissait toujours par son tact et la grande considération qu'il s'était acquise par son âge, sa sagesse et sa vertu. En un mot, il était considéré comme l'arbitre des familles. Il rendait service aux gens, mais sans vanterie, comme quelqu'un qui pense qu'il est là pour ça, trouvant la chose naturelle.

La paroisse lui devait la construction de son église, modeste monument qu'il fit élever à peu de frais, n'épargnant rien, ni démarches, ni soins ; on dit qu'il allait travailler avec les ouvriers pour extraire le sable ou la pierre, habillé d'une vieille soutane et dînant d'un oignon et d'un morceau de pain. Il vivait tranquille dans son presbytère, assez mal logés avec sa soeur, presque aussi vieille que lui et qui faisait son ménage..."


Source :
Association « Livres en Bigorre »

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Lu dans « La Cordée » hors-série de mai 2015 :